Le droit la scolarisation des enfants handicaps commence prendre corps

September 2024 · 5 minute read


A l'occasion d'une conférence de presse le 23 août, Xavier Darcos, le ministre de l'Education nationale, et Xavier Bertrand, son collègue chargé du Travail, des Relations sociales et de la Solidarité, ont dressé un premier bilan et annoncé un certain nombre de mesures nouvelles.

2.700 nouveaux postes d'auxiliaires de vie scolaire

Les ministres ont ainsi confirmé la création de 2.700 postes d'auxiliaires de vie scolaire individuels (AVS-i), chargés d'accompagner les élèves handicapés au sein de classes ordinaires. Ces postes supplémentaires s'ajouteront aux 13.600 AVS (dont environ 12.000 AVS-i) déjà en fonction dans les établissements. La rentrée 2007 verra aussi la création de 200 unités pédagogiques d'intégration (UPI), ce qui portera leur total à 1.119 avec la perspective de disposer de 2.000 UPI à l'horizon 2010. Ces créations de postes - dont les ministres n'ont pas précisé s'ils seront effectivement pourvus dès cette rentrée - sont d'autant plus à souligner qu'elles s'inscrivent dans un contexte de réduction globale des effectifs du ministère de l'Education, fixée par le Premier ministre à 11.200 postes pour l'an prochain.
Pour sa part, Xavier Bertrand a confirmé la création, toujours en 2007, de 1.250 places au sein des services d'éducation spéciale et de soins à domicile (Sessad), qui accompagnent notamment les enfants scolarisés dans des établissements spécialisés.

Des AVS formés et - peut-être - reconnus

Au-delà de ces confirmations, Xavier Darcos a annoncé une mesure très attendue  : l'amélioration de la qualification et de la formation des AVS. Pour cela, les pouvoirs publics ont décidé de s'appuyer sur les associations spécialisées, qui disposent d'une longue expérience en la matière. Dès le mois de septembre, le ministère mettra en place un groupe de travail avec les associations, chargé de "définir le contenu et les modalités de cette formation". Les associations devraient également intervenir dans la sensibilisation des enseignants accueillant des enfants handicapés dans leur classe.
Les ministres sont restés plus discrets sur la question du statut des AVS, aujourd'hui recrutés sur des contrats à durée déterminée d'un an, ce qui inquiète les associations et suscite un début de mobilisation chez les intéressés. Deux logiques s'affrontent en effet. D'un côté, la pérennisation des postes d'AVS s'impose à l'évidence pour assurer la mise en oeuvre du droit opposable à la scolarisation. De l'autre, ces postes, faiblement rémunérés, sont aussi des tremplins temporaires pour des jeunes en parcours d'insertion professionnelle. Les deux ministres n'ont toutefois pas fermé la porte à une évolution vers davantage de professionnalisation, dans le cadre d'un plan "métiers du médico-social" qui devrait être présenté avant la fin de l'année. Les associations, mais aussi les régions, devraient y être associées.

Des progrès spectaculaires

La loi Handicap du 11 février 2005 a sans aucun doute changé la donne en matière d'intégration scolaire, tout en amplifiant une tendance déjà à l'oeuvre depuis plusieurs années. Entre 2002 et 2006, le nombre d'enfants handicapés scolarisés en milieu ordinaire a fortement augmenté, passant de 89.000 à 155.300. Curieusement, la progression a été plus faible en 2006, première année d'application de la loi, avec seulement 4.300 enfants supplémentaires. Mais les chiffres devraient repartir à la hausse dès cette rentrée. Si l'on ajoute les enfants scolarisés dans les établissements spécialisés, le nombre total s'élevait à 235.400 sur l'année scolaire 2005-2006.
Ces progrès spectaculaires - accompagnés par les collectivités territoriales, notamment pour la mise en place des aménagements nécessaires - ne suffisent toutefois pas à rattraper le retard accumulé. D'une part, beaucoup d'enfants ne sont scolarisés qu'à temps partiel, sans que cette situation résulte toujours d'un choix médical ou pédagogique. L'Association des paralysés de France (APF) estime ainsi à 15.000 le nombre d'enfants "scolarisés dans des conditions non-satisfaisantes, soit loin de chez eux, soit avec un nombre d'heures insuffisant". D'autre part, on observe une forte différence entre l'école primaire et le collège. La première accueille 104.500 enfants handicapés, quand le second n'en scolarise que 45.000. Or cet écart pèse lourdement sur les perspectives ultérieures d'insertion professionnelle. La forte augmentation du nombre d'UPI devrait toutefois améliorer la situation dans les prochaines années. Enfin, les associations estiment à environ 15.000 le nombre d'enfants qui restent sans solution, alors qu'ils pourraient bénéficier d'une scolarisation en milieu ordinaire. Pour les parents dans cette situation, le ministère de l'Education nationale met en place, à partir du 27 août, un numéro vert, le 0.810.55.55.00. Ouvert du lundi au vendredi de 8 heures à 18 heures, il aura pour mission de rechercher une solution de scolarisation.

Jean-Noël Escudié / PCA

Attendre pour y croire

Satisfaites, mais vigilantes : ainsi peut-on résumer les réactions des associations à l'annonce de ces mesures. L'Association des paralysés de France (APF) entend d'abord vérifier "si, le 4 septembre, les enfants handicapés sont accueillis comme les autres". De son côté, l'Association pour adultes et jeunes handicapés (Apajh) estime que l'"on ne peut que se féliciter, mais c'est loin de donner satisfaction". Son directeur juge en effet que "le temps passé par les enfants handicapés à l'école restera très insuffisant". L'Apajh rappelle aussi que d'autres questions restent à régler comme la formation des enseignants, l'accessibilité des bâtiments ou le coût des transports.
Les réactions reflètent également la césure traditionnelle entre le monde du handicap physique et celui du handicap mental. L'Unapei (parents d'enfants handicapés mentaux) s'inquiète ainsi des "liens insuffisants entre l'école et les établissements spécialisés" et estime que l'intégration en milieu ordinaire "n'est pas une fin en soi". Selon son directeur général, "les enfants lourdement handicapés ont besoin d'être à la fois quelques heures dans l'école de leur quartier et en établissement spécialisé, or pour l'instant, il y a rarement coordination entre les deux".

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